31 août 1944 : la fuite des collaborateurs, la traque pour les retrouver

Publié le
Modifié le
Guy Eclache, Julien Berthon...
  • Notre histoire
Chapô

Chaque jour du 20 août au 2 septembre, en coopération avec le Musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère, nous vous faisons revivre dans ces colonnes la Libération de l’Isère, telle qu’elle s’est déroulée il y a 80 ans, jour par jour. Episode 12...

Guy Éclache et Julien Berthon, qualifiés d’ennemis publics numéros 1 et 2 par Les Allobroges, auront réussi à se cacher de nombreuses années en Italie avant d’être retrouvés et traduits en justice. Claire Darré-Touche, patronne de la biscuiterie Brun et ouvertement maréchaliste, trouvera quant à elle refuge en Suisse. Photo Coll. Musée de la Résistance et de la Déportation – Département de l’Isère et Coll. Musée dauphinois – Département de l’Isère.

 

 

“Pour que justice soit faite et leurs victimes vengées, il faut les capturer morts ou vifs”. Le 31 août 1944, un article paraît dans Les Allobroges sous ce titre. Et sont listés, photographies à l’appui, les ultras de la collaboration iséroise. 

 Il faut dire que les nazis, avant même d’occuper la zone libre, ont noué des contacts à Grenoble. Et dès novembre 1943, à l’heure où ils succèdent aux Italiens, des collaborateurs se lancent dans la lutte armée contre les résistants et vont multiplier les exactions. Certains d’entre eux deviennent d’ailleurs des membres à part entière de la Gestapo.

Le printemps et l’été 1944 sont particulièrement marqués par des meurtres sordides commis par les collaborateurs, ou des arrestations en masse auxquelles ils ont contribué.

Aussi, les directives du chef départemental des forces de police de la Libération, Louis Nal, sont claires : « Il faut procéder à l’arrestation la plus rapide possible de tous les collaborateurs, traîtres, mouchards, indicateurs et employés des polices allemandes, rabatteurs de l’organisation Todt et des offices de placement allemand, de tout individu ayant appartenu aux organismes suivants : Milice française, Service d’ordre légionnaire, Légion des volontaires contre le bolchevisme, Parti populaire français (PPF), Jeunesses populaires françaises (JPF), Rassemblement national populaire (RNP), groupe Collaboration, Europe nouvelle, Jeunes de l’Europe nouvelle, Ligue française, Le Franciste, Front social du travail et autres traîtres ou suspects ».

Mais l’approche de la Libération a fait fuir la plupart des principaux chefs de la collaboration en Isère, principalement en Italie. Fuyards mais pas oubliés. Pour les résistants qui se souviennent des souffrances endurées, la fin de la guerre ne sonne pas celle des comptes. 

Et pendant plusieurs décennies encore, les “collabos” les plus notoires de l’Isère seront recherchés, et pour la plupart retrouvés et traduits en justice.

 

Éclache, « l’ennemi public numéro 1 »

Mais revenons à l’article des Allobroges , qui dit beaucoup du climat qui règne à la Libération. Passée l’euphorie de voir la liberté revenue, la fuite des collaborateurs choque l’opinion et le journal ne s’y trompe pas, réclamant justice.

Le nom de Guy Éclache apparaît en première ligne dans l’article. Il y est présenté comme “l’ennemi public numéro 1”. Service d’ordre légionnaire, PPF, Milice, Jeunes de l’Europe nouvelle, recrutement pour la Waffen-SS, Gestapo… L’homme aura fait le tour de tous les organes de la collaboration qu’il incarne véritablement à Grenoble.

Il faut dire que le groupe d’une trentaine d’hommes qu’il a réuni au sein des Jeunes de l’Europe nouvelle a pris part à de nombreuses actions de répressions après l’arrivée des Allemands en septembre 1943. Et notamment les trois derniers mois avant la Libération où ils ont multiplié les exactions. Il est notamment imputé à Éclache le meurtre de Paul Vallier, héros de la Résistance grenobloise.

À l’approche des Américains, Guy Éclache se réfugie en Italie du Nord et trouve refuge dans un monastère.

Mais la traque continue et des résistants, parmi lesquels Pierre Fugain, père du chanteur Michel, le ramènent à Grenoble où il est condamné et fusillé à l’automne 1945.


Les exactions de la Milice et de son chef Julien Berthon

Julien Berthon, inspecteur de la Milice, disparaît lui aussi durant la Libération. Il sera retrouvé plusieurs années après. Lors de son procès en 1951, il sera question de douze opérations meurtrières menées contre la Résistance.

L’une d’elles, marquante, a visé André Moch, chef d’un réseau de résistance et fils du ministre du Front populaire Jules Moch. Lors de cette tentative d’arrestation à Corenc, André Moch a riposté à la mitraillette. Blessé, il a été achevé d’une balle dans la tête.

Ce sont aussi les hommes de Berthon qui participent, au côté des Allemands, à la terrible rafle de La Tour-du-Pin en mai 1944, qui se solde par 25 arrestations et de nombreuses déportations.

Autres faits reprochés à Berthon lors de son procès en 1951, l’assassinat et la déportation des membres de l’École nationale professionnelle de Voiron, soupçonnés d’avoir assassiné en 1944, le chef milicien Jourdan et sa famille. Julien Berthon sera condamné aux travaux forcés à perpétuité en 1951.

 

Industrielle, maréchaliste et réfugiée en Suisse

Autre profil, Claire Darré-Touche fait, elle aussi, partie des collaborateurs ayant fui la région à l’arrivée des armées de la Libération. Responsable de la biscuiterie Brun, elle acclame tour à tour le maréchal Pétain et l’occupation allemande. Les services du maréchal lui permettent de se réfugier en Suisse en août 1944. 

L’usine est mise sous séquestre par le comité d’épuration. Elle est administrée pendant deux ans par un comité de gestion incluant des ouvriers qui organisent de belles avancées sociales.

Corps suite

Cliquez pour agrandir Le journal Les Allobroges

 

Image

 

3
minutes de votre temps
A- A+
Publié le
Modifié le