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Le 25 juin 524, Clodomir, fils de Clovis et de la reine Clotilde, trouve la mort lors de la bataille de Vézeronce, près de Morestel. Mille cinq cents ans plus tard, la commune célèbre la légende de ce prince mérovingien.
Ce tableau, représentant Clodomir et son armée, est l'œuvre de Paul Gaillard, ancien maire de Vézeronce-Curtin, qui en a fait don à la commune. Il a très longtemps été exposé dans la salle des mariages.
Si l’authenticité du personnage ne fait pas de doute, le récit de sa vie tient autant de l’histoire que de la légende. C’est vers 495 que naît ce prince mérovingien qui a grandi dès son plus jeune âge dans les intrigues du pouvoir.
En 511, à la mort de son père, il se partage le royaume des Francs avec ses trois frères, Thierry, Childebert et Clotaire, et devient roi d’Orléans.
Clovis, qui a hérité à l’âge de 15 ans d’un royaume modeste dans le nord de la France, a réussi, en trente ans de règne, à unifier la Gaule. Seules la Burgondie et la Provence lui échappent. À sa mort, en 511, son royaume est partagé entre ses quatre fils, Thierry, Clodomir, Childebert et Clotaire.
Assoiffés de conquête, Clodomir, Childebert et Clotaire – prenant prétexte de la rocambolesque vendetta entre leur mère, la reine Clotilde et ses oncles et neveux depuis l’assassinat de son père, Chilpéric II de Bourgogne – unissent leur force pour déclarer la guerre au roi burgonde, Sigismond, leur cousin.
En 523, les premières escarmouches tournent à l’avantage des Francs. L’armée burgonde est disloquée. Sigismond est détrôné et emprisonné à Orléans avant d’être exécuté le 1er mai 524 avec sa femme et ses deux fils, sur ordre de Clodomir.
Son frère, Godomar III, le dernier de la lignée, réunit ses troupes et organise la résistance, ce qui pousse Clodomir à reprendre les armes pour pacifier la région.
Il s’empare de Lyon sans rencontrer de résistance avant de se confronter à l’armée adverse le 25 juin 524 dans la plaine de Vézeronce. La rencontre se solde par une nouvelle déroute des Burgondes. Bien décidé à en finir, Clodomir se lance à la poursuite des fuyards. L’évêque et historien Grégoire de Tours raconte sa folle chevauchée :
“Clodomir s’était écarté des siens à une grande distance ; les adversaires contrefaisant son signe de ralliement lui crient : tourne-toi par ici, car nous sommes tes hommes. Lui, leur ajoutant foi, se jeta au milieu des ennemis.”
Erreur tragique ! Les Burgondes capturent Clodomir, l’exécutent, le décapitent et fichent sa tête sur une pique.
Une victoire en trompe-l’œil
Godomar en fuite, Clodomir mort… la bataille s’achève. Quant à savoir qui l’a remportée, on l’ignore encore mille cinq cents ans plus tard tant les témoignages diffèrent.
Selon Grégoire de Tours, les Francs, voyant leur chef décapité, se seraient ressaisis et auraient exterminé les Burgondes. Une version formellement démentie par Agathias, historien de l’empereur byzantin de Constantinople, qui attribue la victoire aux Burgondes, tandis que Marius, évêque d’Avenches, ne fait que mentionner la bataille et la mort du roi.
Si l’issue demeure incertaine, l’épisode excite l’imagination des historiens, qui voient dans cette bataille les prémices de la réunion des royaumes franc et burgonde, qui esquissera les frontières de la France dix ans plus tard, à l’issue de la bataille d’Autun.
Le casque de Vézeronce, de facture byzantine, aurait été fabriqué dans l’antique cité slovène de Caricin Grad, avant d’être exporté chez les Burgondes ou chez les Francs. Il est exposé au musée de l’Ancien Evêché, à Grenoble.
Qui a porté le casque de Vézeronce ?
En 1871, en découvrant par hasard un casque dans la tourbe au lieu-dit des Rippes-de-Pillardin, un agriculteur a involontairement alimenté la légende. Ce casque d’apparat, parfaitement conservé, qui a servi d’abreuvoir avant de passer de mains en mains et qui figure désormais parmi les fleurons des collections du musée de l’Ancien Évêché, à Grenoble, aurait-il appartenu à Clodomir ? À un chef burgonde ? A-t-il un lien avec cette bataille ?
Seule certitude, c’est non seulement le seul casque d’époque mérovingienne trouvé dans toutes les Alpes du Nord, mais c’est également, pour la même région, la seule véritable pièce d’armement. L’archéologue Michel Colardelle en a conclu : “Quelle que soit l’appartenance politique du personnage inhumé dans les marais de Vézeronce, cette sépulture est liée à cette bataille.”*
Après la mort de Clodomir, ses frères s’empressent d’éliminer leurs trois jeunes neveux pour se partager ses terres, créant un précédent pour les successions futures qui va entraîner la désunion, la fragmentation et la guerre dans les royaumes mérovingiens pour aboutir à la désintégration de la dynastie, en 751.
* L’archéologie funéraire permet-elle de mesurer la poussée franque en Burgondie au VIe siècle ? de Patrick Périn, Artehis Éditions, 1995.
©B.Fouquet/ Département de l'Isère - Musée Dauphinois
Repères
Oyez, oyez !
Samedi 7 septembre, venez passer une journée en famille sur le site des Epinettes à Vézeronce-Curtin, redécoré aux couleurs de la Gaule mérovingienne, à l'occasion des 1500 ans de la mort du héros.
Coup d'envoi à 10 heures avec une série d'animations : danse médiévale, combat à l'épée, démonstration de vol de rapaces, troubadours, contes médiévaux, ferme pédagogique. Les visiteurs découvriront également de l'artisanat local, mais aussi des ateliers de démonstrations des métiers médiévaux entre tissage de la laine, forge, et fabrication de cotte de mailles.
Le soir, un banquet médiéval (sur réservation) réunira les participants. Les festivités s'achèveront par un grand spectacle nocturne équestre. Plus de 10 heures de spectacle réjouiront petits et grands. Entrée gratuite.
Informations et réservations à partir du 1er juillet sur : https://bit.ly/4aj5Eoe
Zoom
Un territoire mobilisé
Si la bataille de Vézeronce n’a pas laissé un souvenir impérissable dans la mémoire collective, les Vézerontins, qui ont choisi le casque pour emblème de leurs armoiries, ne l’ont pas oubliée. Ils célèbrent depuis 2011 la légende de Clodomir.
“Du fait de la lourdeur de la logistique puis des conséquences de la crise sanitaire, cette manifestation a connu sa dernière édition en 2018. Nous saisissons l’opportunité des 1 500 ans pour la relancer”, explique Christine Nemoz, membre du comité des fêtes de Vézeronce-Curtin.
Une centaine de bénévoles de Vézeronce et des villages environnants sont sur le pont depuis le mois de janvier pour gérer la logistique : construction du village en bois, décoration du site, confection de costumes, gestion de la restauration…
Histoire
La vengeance de la reine Clotilde
En 480, le roi des Burgondes, Gondebaud, qui avait été précédemment dépossédé de ses États par ses deux frères, Chilpéric et Gondemar, s’empare de la ville de Vienne, où, grâce à la rumeur de sa mort, ces princes se partageaient ses terres.
Une fois Gondemar mort, lors du sac de la ville, Gondebaud fait trancher la tête de Chilpéric et de ses deux fils puis précipiter sa femme dans le Rhône, avant de forcer leur fille aînée fille à entrer au couvent.
Touché par la jeunesse de la cadette, Clotilde, il l’épargne avant d’accorder sa main à Clovis, roi des Francs, en 498. Las, ce mariage ne favorise nullement la paix entre Francs et Burgondes tant Clotilde hait son oncle.
La mort de ce dernier, en 516, n’éteint pas sa haine contre les Burgondes. Trente-trois ans après le meurtre de ses parents, elle convoque ses fils : “Que je n’aie pas à me repentir, mes très chers enfants, de vous avoir nourris avec tendresse ; partagez le ressentiment de mon injure, et mettez vos soins à venger la mort de mon père et de ma mère”, leur aurait-elle dit, selon Grégoire de Tours. Il n’en faut pas plus à Clodomir et à ses frères pour déclencher les guerres de Burgondie.
Sigismond, qui a succédé à son père, Gondebaud, est capturé avec sa femme et ses fils puis livré à Clodomir qui les fait exécuter avant de jeter leur corps dans un puits, comme il avait été fait avec la mère de Clotilde, dans un esprit macabre de vengeance symbolique.