Enfer et damnation : quand Berlioz pactise avec Faust

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Où est le bien, où est le mal ? Le mythe de Faust par Goethe n’en finit pas d’inspirer les artistes depuis le XIXe siècle. Le musée Hector-Berlioz raconte comment le compositeur côtois s’en empara pour en faire ce chef-d’œuvre inclassable : La Damnation de Faust.

En 1828, Hector Berlioz, élève au Conservatoire de Paris, découvre la traduction française du Faust de Goethe par Gérard de Nerval : fasciné, il entreprend aussitôt de le mettre en musique. Il envoie la partition de ses Huit Scènes de Faust à Goethe. Sans retour de sa part. 

Popularisé en 1592 par l’anglais Marlowe, puis en 1808 par le poète allemand Johann Goethe, le mythe germanique autour du docteur Faust, cet alchimiste qui rêve de percer les mystères de l’existence, suscite à l’époque un vrai engouement chez les artistes romantiques, inspirant de multiples compositions, adaptations et illustrations. 

Parmi les plus remarquables, les dix-sept lithographies réalisées par le peintre Eugène Delacroix sont aussitôt considérées comme des chefs-d’œuvre. Mélancolie, mal de vivre, soif de connaissance, idéal féminin et besoin de domination : Faust incarne le héros prométhéen par excellence. 

C’est seulement en 1845, alors qu’il voyage à travers l’Autriche-Hongrie, que Berlioz reprend le livret pour donner naissance à La Damnation de Faust. Non pas un opéra, mais une « légende dramatique » mêlant chant choral et orchestration symphonique, conçue comme une succession de scènes quasi cinématographiques. 

Si l’on retrouve les grandes péripéties du Faust de Goethe, le compositeur prend quelques libertés avec l’intrigue : Marguerite parvient à sauver son âme grâce au sacrifice de Faust, qui ne peut échapper à la damnation…

 

L’œuvre préférée de Berlioz

Mais le 6 décembre 1846, quand l’œuvre est enfin créée à l’Opéra-Comique, c’est le flop. Ruiné et profondément blessé, le compositeur incompris entreprend alors une tournée sur les grandes scènes européennes, de Moscou à Berlin : La Damnation de Faust est tout de suite ovationnée !

Il faudra attendre encore une dizaine d’années après la mort de Berlioz, en 1869, pour que son ouvrage connaisse toutefois un vrai retour en grâce à Paris, repris par de prestigieux chefs d’orchestre, comme Jules Pasdeloup au cirque d’Hiver et Édouard Colonne au Châtelet. Ce dernier donnera près de 150 représentations de La Damnation en moins de trente ans. 

En 1893, Raoul Gunsbourg créera à Monte-Carlo une toute première version scénique avec des jeux de lumière et des effets spéciaux dignes d’un jeu vidéo : la scène de chevauchée à travers l’orage totalement fantasmagorique est incroyable !

Riche de nombreux documents originaux – partitions, illustrations, programmes ou maquette en 3D –, le musée nous raconte cette passionnante épopée musicale, d’hier à aujourd’hui. 

Dans la dernière salle, on savourera la scène « cultissime » de Louis de Funès dirigeant en personne la Marche hongroise à l’opéra Garnier, dans La Grande Vadrouille. L’œuvre n’en finit d’ailleurs pas d’inspirer les créateurs contemporains, comme Terry Gilliam.

 

©Musée Berlioz

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100e Faust
Affiche de la 100e représentation de La Damnation de Faust. Association artistique des Concerts Colonne et le journal L’Eclair. 1898 © Coll. Musée Hector-Berlioz

 

« Enfer et damnation ! Mythe et légende de Faust » 

Musée Hector-Berlioz, 69 rue de la République, La Côte-Saint-André. Jusqu’au 31 décembre. Entrée gratuite tous les jours (fermé le mardi). 

Contacts : 04 74 20 24 88 - musees.isere.fr

 

©Musee Berlioz.

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