- Ça s'explique
L’expérience iséroise en matière d’actions à l’étranger n’est plus à démontrer. Le Département mais aussi les acteurs locaux, notamment culturels, disposent de compétences reconnues par les autorités françaises et internationales.
Patrick Curtaud, vice-président du Département en charge de la culture, du patrimoine, du devoir de mémoire et de la coopération internationale nous explique la politique du Département en matière de coopération internationale.
Isère Mag : Pourquoi le Département est-il engagé dans une politique de coopération internationale ?
Patrick Curtaud : Je pense que les collectivités locales ont un rôle à jouer dans l’amélioration des conditions de vie des populations et dans la construction d’un monde plus équitable. L’Isère n’est pas fermée sur elle-même.
Elle a toujours été une terre d’accueil, de croisements de populations, d’ouverture et de solidarité, traditionnellement tournée vers l’international, tant par la présence de nombreuses communautés d’origine étrangère que par son tissu économique très cosmopolite.
D’ailleurs, dès son autonomie administrative en 1982, le Conseil général d’alors a soutenu des actions d’aide au développement. Et à partir de 2001, il a mis en place une politique de coopération décentralisée, point de départ de relations pérennes et stables avec des territoires ruraux étrangers choisis en raison de leurs liens traditionnels avec l’Isère, de leurs besoins de soutien et de leur envie d’échanges.
Aujourd’hui, cette tradition d’ouverture au monde et aux autres cultures se poursuit mais, pour plus d’efficacité, le Département a resserré le champ de ses interventions en entretenant des relations suivies avec deux pays : le Sénégal et l’Arménie.
Cependant, nous pouvons, de manière ponctuelle, apporter un soutien humanitaire lors de situations d’urgence : l’Ukraine en 2022, la Turquie et la Syrie cette année.
I. M. : Une délégation iséroise revient justement du Sénégal, au moment où s’engage une nouvelle étape de la coopération entre l’Isère et le Département de Kédougou. Quel est l’objectif de ce partenariat ?
P. C. : Avec le président du Département de Kédougou, également ministre du Sénégal, a été signée la deuxième convention qui nous lie avec ce territoire rural de 90 000 habitants, situé dans l’extrême sud-est du Sénégal.
Très développé dans les domaines de la santé et du tourisme durable, notre partenariat, qui porte sur la période 2023-2028, s’appuie sur des opérateurs aguerris et intègre de nouvelles thématiques, comme le soutien au développement économique, la gestion des feux ou encore l’accès à l’eau et l’assainissement.
Le volet culturel, singularité de cette coopération, sera également renforcé avec l’organisation d’une exposition sur le Pays bassari*, présentée en 2024 au Musée dauphinois, en co-commissariat avec deux musées de Dakar. Mais Kédougou n’est pas le seul territoire sénégalais où le Département de l’Isère intervient.
Depuis 2005, nous aidons également à structurer et à développer la réserve naturelle du Boundou, dans l’est du pays. Grâce à notre expérience – le Département gère 17 espaces naturels sensibles (ENS) en Isère –, cet ancien territoire de chasse est devenu lui aussi un ENS local externalisé, avec son propre plan de gestion.
Outre la protection de l’environnement, celui-ci vise à promouvoir la réserve comme une véritable destination touristique durable, à développer l’éducation à l’environnement et à favoriser le développement économique local par la structuration de filières génératrices de ressources pour les habitants : agriculture, élevage, santé, énergie… Là encore, l’Isère est particulièrement remarquée pour la qualité de ses actions, qui s’inscrivent dans la durée, et on peut constater leur bénéfice auprès des populations.
I. M. : Et en ce qui concerne l’Arménie ?
P. C. : La guerre qui menace toujours l’Arménie ne nous empêche pas de poursuivre nos programmes de coopération initiés dès 2004 avec la préfecture du Guégharkunik. Pour plus d’efficience, le Département porte une attention au développement d’actions mutualisées et au travail en réseau en partageant notamment certaines actions avec les Villes de Grenoble et de Vienne.
Nos actions en Arménie portent principalement sur la structuration du tourisme de randonnée dans des territoires ruraux et la rénovation de centres de santé. Nous soutenons aussi de nombreux projets culturels et artistiques autour de la musique, du théâtre avec des compagnies qui se rendent en Arménie, tout ceci afin de (r)établir des ponts entre nos deux cultures avec comme fil rouge la promotion de la francophonie, indispensable à la présence française dans ce pays ami.
I. M. : Pourquoi avoir mis en place un appel à projets ?
P. C. : Depuis 2016, le Département s’est engagé dans le soutien de projets de coopération internationale menés par les acteurs isérois, nombreux à s’investir en faveur de la coopération culturelle internationale et de l’éducation à la citoyenneté mondiale. Ce sont 43 projets qui ont ainsi été soutenus.
I. M. : Quel est le montant du budget consacré à la coopération internationale ?
P. C. : Nous lui consacrons un budget d’environ 450 000 euros chaque année. Nous sollicitons les institutions nationales et internationales et obtenons régulièrement des financements complémentaires.
Mais ce que nous apportons d’abord, c’est nos savoir-faire en matière de tourisme, d’agriculture, de santé, d’éducation ou de développement durable à travers un soutien aux acteurs isérois (services départementaux, associations, établissements publics, etc.) qui se mobilisent à nos côtés.
Nous agissons toujours dans une logique de partenariat réciproque et de confiance mutuelle.