- Ça s'explique
Le budget 2022 du Département de l’Isère a été voté les 9 et 10 décembre. Il se monte à 1,6 milliard d’euros et est le premier budget de cette nouvelle mandature qui s’échelonnera jusqu’en 2028. Décryptage avec Julien Polat, vice-président chargé des finances et de la contractualisation.
Isère Mag : Comment ce budget primitif 2022 a-t-il été construit ?
Julien Polat : Le Département de l’Isère est en bonne santé financière et c’est certainement ce qui a conduit les Iséroises et les Isérois à nous renouveler leur confiance lors des élections départementales de juin dernier. Cependant, nous sommes vigilants face à l’avenir, car nos dépenses obligatoires ne cessent d’augmenter tandis que nos recettes vont tendre à baisser sous l’effet de la perte de notre autonomie fiscale. Cet effet ciseaux a des conséquences sur nos marges de manœuvre.
Ainsi, par exemple, avec la revalorisation des salaires des travailleurs des services d’aides et d’accompagnement à domicile mise en place en octobre dernier par le gouvernement, dépenses certes justifiées, ce sont 12 millions d’euros supplémentaires que le Département de l’Isère doit prendre à sa charge chaque année sur son budget de fonctionnement. On nous promet chaque fois des compensations, mais la plupart du temps elles ne sont que partielles et ne durent pas dans le temps. Souvent, le Département doit donc payer ce qui est décidé par le gouvernement.
Nos six exercices budgétaires précédents, de 2014 à 2020, ont également été impactés par la baisse des dotations de l’État qui, en montants cumulés, s’élève à 470 millions d’euros, soit le coût de construction de 30 nouveaux collèges !
Ce manque à gagner, conjugué à des dépenses obligatoires qui risquent d’augmenter encore – je pense notamment à la revalorisation du point d’indice des fonctionnaires, mais également aux attentes du secteur médico-social – nous préoccupe. D’autant qu’entre-temps nous avons perdu un levier fiscal important avec la suppression de notre part sur la taxe foncière. Alors pour qualifier ce budget 2022, je dirais qu’il est volontaire, rigoureux et surtout anticipatif.
I. M. : Anticipatif ? C’est-à-dire ?
J. P. : Pour sécuriser nos recettes, nous avons décidé d’augmenter à compter du 1er juin 2022 le taux des droits de mutation à titre onéreux à son maximum autorisé de 4,5 %, contre 3,8 % auparavant. Nous étions jusqu’alors l’un des trois départements français, avec l’Indre et le Morbihan, à disposer d’un taux aussi bas. Cette taxe, prélevée sur les transactions immobilières, est plus communément appelée « frais de notaire ».
Ceux de nos concitoyens qui ont la chance d’être propriétaires ne la payent donc généralement qu’une à deux fois dans leur vie au moment d’acheter leur habitation, mais par l’effet du volume des transactions, elle devrait nous rapporter 34 millions d’euros supplémentaires en année pleine si la dynamique actuelle du marché immobilier se poursuit, une somme qui nous permettrait de récupérer des marges de manœuvre pour faire face à l’explosion de la demande sociale à venir.
Car l’enjeu est bien de pouvoir continuer à remplir nos missions fondamentales, c’est-à-dire accompagner et protéger les Iséroises et les Isérois les plus fragiles, personnes âgées, personnes handicapées, petite enfance, allocataires du RSA… pour lesquels nous consacrons environ 800 millions d’euros, soit plus de 50 % de notre budget. Si nos recettes n’étaient pas sécurisées, les personnes les plus modestes seraient les premières victimes d’une défaillance du Département.
I. M. : Quelles sont les principales caractéristiques de ce budget ?
J. P. : Il s’inscrit dans la dynamique du précédent. C’est un budget de reprise destiné, comme nous l’avons fait l’an passé en soutenant les associations, les entreprises et le tissu socio-économique, à accompagner la relance, l’emploi et l’attractivité en Isère.
Sa principale caractéristique, c’est le montant historiquement élevé du budget d’investissement : 407 millions d’euros ! Ce budget nous permettra de poursuivre nos grands chantiers, comme le plan Très Haut Débit de déploiement de la fibre optique, la sécurisation de nos routes départementales, l’acte II du plan de rénovation des collèges, avec un effort porté sur l’isolation thermique des bâtiments mais aussi, comme nous le faisons depuis fort longtemps, un soutien sans faille aux communes et aux intercommunalités pour les aider dans leurs projets d’écoles, de piscines, de réseaux de chaleur ou encore d’infrastructures.
La culture, avec le lancement en 2022 d’un concours pour “muséographier” le 12e musée départemental à Vienne, l’agriculture durable et la structuration de notre marque ISHERE, portée par le Pôle agroalimentaire, font aussi partie de nos priorités pour l’année à venir avec des budgets en hausse. Enfin, l’autre grande caractéristique de ce budget est qu’il est tourné vers la jeunesse.
I. M. : Des nouveautés ?
J. P. : Nous avons déjà mis en place, avec succès (+ 6 % de fréquentation en moyenne), le repas à 2 euros dans les restaurants scolaires de nos collèges et prenons en charge 50 % du coût des licences sportives pour tous les collégiens. Nous avons également provisionné 1 million d’euros pour que, dès la rentrée prochaine, en collaboration avec la CAF et les intercommunalités, le Pack’loisirs soit gratuit pour tous les collégiens, et que son coût, auparavant de 8 euros, ne soit plus un frein à l’utilisation de ce dispositif. Nous porterons aussi les avantages de ce Pack’loisirs à 60 euros, contre 56 euros jusqu’à présent.
Enfin, nous allons lancer une Bourse aux projets jeunes en Isère, dotée de 100 000 euros. Elle s’adressera aux 11-25 ans, porteurs de projets citoyens, solidaires, culturels et sportifs.
L’idée est à la fois d’encourager leur engagement citoyen, de valoriser les initiatives qu’ils portent et de favoriser leur autonomie, tout cela dans le respect des valeurs de la République.
Faites connaissance en vidéo avec Julien Polat, 2e vice-président du Département.