- Société
- Santé
Alors que la campagne vaccinale anti-Covid a débuté, certains s’inquiètent des risques d’effets secondaires que provoqueraient les nouveaux vaccins. Le professeur Olivier Épaulard, du service des maladies infectieuses du CHU Grenoble Alpes, lève le doute.
Isère Mag : Comment vont agir les vaccins contre la Covid-19 ?
Olivier Épaulard : Le but d’un vaccin est d’apprendre à notre système immunitaire à reconnaître et à fabriquer des anticorps pour se défendre contre un virus ou une bactérie.
Concernant le coronavirus de la Covid-19, de nombreuses méthodes ont été étudiées. Les plus classiques reposent sur l’injection d’un fragment du virus (une protéine) ou d’un virus tué, voire d’une version affaiblie du virus. D’autres, plus innovantes, consistent à administrer un virus inoffensif mais exprimant l’une des protéines du coronavirus, soit l’ARN messager. L’ARN messager est un fragment de gène du virus : le gène de la protéine Spike, la molécule qui lui donne sa forme de couronne et lui permet de nous infecter en s’accrochant à la cellule.
Lors de son injection, la protéine Spike est produite et l’organisme apprend à développer une réponse protectrice contre le virus. C’est sur ce principe qu’ont été mis au point les vaccins des laboratoires Pfizer-BioNtech et Moderna.
I. M. : Peut-on craindre des effets secondaires ?
O. E : Ces vaccins, comme les autres, peuvent déclencher des douleurs ou des rougeurs modérées et transitoires au point d’injection, et parfois un peu de fièvre, mais pas d’effets indésirables graves. Contrairement à ce qui a été évoqué, cet ARN ne peut pas s’intégrer dans le noyau de la cellule et modifier notre ADN.
I. M. : Comment ces vaccins ont-ils pu être mis au point dans un temps record ?
O. E. : Cela fait des dizaines d’années qu’on travaille sur l’élaboration de nouveaux vaccins contre le VIH, Ebola ou certains cancers. Cela nous a permis d’acquérir énormément de connaissances sur les nouvelles méthodes de vaccination.
Par ailleurs, on avait déjà travaillé sur d’autres coronavirus à la suite des épidémies provoquées par le SARS en 2003 et le MERS en 2012. On savait ainsi que la protéine Spike était un très bon candidat pour un vaccin. Après l’identification du virus en janvier 2020, on a pu mener des essais chez l’animal, puis chez l’homme qui ont montré une protection de l’ordre de 95 %. Par ailleurs, un énorme effort scientifique et financier a été engagé.
I. M. : Comment la campagne vaccinale se déroulera-t-elle en Isère ?
O. E. : Le CHU Grenoble Alpes centralise les vaccins à – 80 °C et les répartit dans les Ehpad de l’Isère et dans les centres de vaccinations de ville. Ces derniers seront mis en place avec les collectivités locales, comme le Département et les communes, les soignants de ville, médecins, infirmiers, pharmaciens et le CHU. Cette campagne est un réel défi logistique, mais je suis sûr que nous y arriverons !
I. M. : Le virus a déjà muté. Peut-on craindre une inefficacité de la vaccination ?
O. E. : Le virus mute très lentement. Les vaccins actuels sont toujours actifs sur les différents variants. Le but est de vacciner suffisamment pour mettre fin à la circulation du virus et donc de s’éloigner du risque de mutants trop différents.
Zoom
Calendrier vaccinal : Pour qui et quand ?
- Depuis le 27 décembre : les résidents des Ehpad et de services de longs séjours, les soignants de plus de 50 ans et/ou présentant des risques de comorbidités.
- Depuis la mi-janvier : les personnes de 75 ans et plus, puis celles âgées de 65 à 74 ans présentant des risques.
- Jusqu’au printemps : les plus de 50 ans ou personnes à risques, et tous les professionnels de la santé et du médico-social.
- Printemps-été : les personnes vulnérables (sans domicile fixe, vivant dans les prisons ou hébergées dans les foyers…) et les professionnels les prenant en charge. Les personnes dont les conditions de travail favorisent l’infection (ouvriers du bâtiment, personnel des abattoirs…).
- Dernière phase : le reste de la population adulte.