Station météo du col de Porte : la mémoire du climat

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La station nivo-météorologique du col de Porte, en Chartreuse, délivre depuis soixante ans des informations précieuses sur le manteau neigeux et permet aujourd’hui de traquer les bouleversements climatiques.

La station météorologique du col de Porte a vu le jour en 1959, au terme de dix ans de discussion entre la Météo nationale – aujourd’hui Météo-France –, l’administration des Eaux et Forêts, traditionnellement intéressée par les avalanches, et EDF. À l’époque, la France étant en manque d’électricité, l’entreprise prospectait la montagne, à la recherche de sites propices à l’installation de barrages ; d’où son vif intérêt pour l’amélioration des connaissances hydrauliques nivales et glaciaires. Le choix du site ne doit rien au hasard. Implanté sur le versant nord du col, à 1 325 mètres d’altitude, sur une parcelle peu pentue de 5 000 mètres carrés, cet observatoire présente le double intérêt de bénéficier d’un enneigement durable caractéristique des Alpes du Nord et de la proximité de Grenoble, dont il n’est distant que de 20 kilomètres.


Un terrain de jeu pour les scientifiques

Les partenaires équipent sans attendre ce laboratoire à ciel ouvert : thermographe, hygrographe, thermomètres, anémomètre, girouette, thermopiles, nivomètre… Dès 1961, des relevés quotidiens sont effectués : vitesse du vent, cumul des précipitations, hauteur de neige fraîche, température, humidité de l’air, rayonnements pour diverses longueurs d’onde, densité et tassement du manteau neigeux.

Autant de données transmises au Centre d’études de la neige (CEN), une entité de la Météorologie nationale créée simultanément à Saint-Martin-d’Hères pour étudier l’évolution du manteau neigeux. “Celui-ci joue un rôle crucial en montagne pour les ressources en eau, la production hydroélectrique, l’économie et l’activité touristique. En outre, les risques naturels, avalanches et crues de montagne, résultent directement de l’état de la neige”, analyse Jean-Louis Dumas, directeur adjoint du CEN.
À partir des années 1960, les chercheurs s’essaient aux premiers tests de prévision du risque d’avalanche à l’échelle des Alpes et des Pyrénées. Une mission réglementaire qui incombera officiellement à la direction de la Météorologie nationale en 1970, au lendemain de l’avalanche ayant provoqué la mort de 39 personnes à Val-d’Isère. Depuis, le rôle opérationnel de l’estimation du risque d’avalanche a été transféré aux stations de montagne de Chamonix, Briançon et Bourg-Saint-Maurice, le CEN se recentrant sur les activités de recherche et de modélisation.

Les infrastructures de la station météo du col de Porte sont régulièrement utilisées par d’autres scientifiques. Tels ceux de la direction technique générale d’EDF pour ses tests de pluviomètres, ceux du laboratoire des Ponts et Chaussées de Nancy, habitués à effectuer des essais de tenue de route sur les chaussées, ou ceux de la SNCF qui réalise actuellement avec Réseau de transport d’électricité (RTE) des  recherches sur le givrage des caténaires.


Vigilance météo

Les données climatiques recueillies au col de Porte sont également utilisées par le Centre météorologique des Alpes du Nord, une entité opérationnelle de Météo-France chargée de réaliser et de diffuser les prévisions météo sur les départements de l’Isère, de la Savoie et de la Haute-Savoie.

Pour accomplir cette mission, elle dispose d’un réseau de stations climatologiques. Celui de l’Isère, l’un des plus denses de France du fait de la diversité géographique et climatique du département, comporte 70 stations qui effectuent des relevés quotidiens de précipitations.

 

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L'énigme de la météo grenobloise

Les relevés météo de Grenoble ont longtemps été effectués sur le site de l’ancien aéroport Grenoble-Mermoz à Eybens, puis à Saint-Martin-d’Hères et à l’aérodrome du Versoud. Avec un problème majeur, le climat du Versoud, typique du Grésivaudan, n’est en aucun cas représentatif de celui de Grenoble, aux fortes spécificités géographiques et urbaines.

Depuis octobre 2019, les relevés sont effectués à Grenoble, à la confluence du Drac et de l’Isère, sur le site de l’Institut Laue-Langevin. “Pour autant, les prévisions de la météo grenobloise relayées par les médias nationaux sont encore basées sur les relevés enregistrés à l’aéroport de Grenoble-Isère, à Saint-Étienne-de-Saint-Geoirs. D’où des problèmes de représentativité des diverses mesures”, déplore Serge Taboulot, directeur du centre météo des Alpes du Nord de Météo-France. Il souhaite que le site grenoblois devienne la référence.

Repères

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Des mesures qui valent de l’or

En soixante ans, les conditions environnementales du col de Porte n’ont pas évolué. “Ce qui nous permet aujourd’hui d’expliquer la construction et l’évolution du manteau neigeux, mais aussi de travailler sur le réchauffement climatique, en particulier dans les stations de moyenne montagne”, souligne Jean-Louis Dumas, directeur adjoint du Centre d’études de la neige. Les précipitations se sont maintenues au fil des décennies ; en revanche, la température a augmenté de près de 1°C, entraînant de fait l’augmentation de l’altitude de la limite pluie/neige.

Cette hausse du thermomètre s’est traduite par une diminution de l’épaisseur du manteau neigeux de l’ordre de 40 %, soit 40 centimètres, du 1er décembre au 30 avril. L’enneigement actuel du col de Porte (1 325 m) est identique à celui de la station du Sappey- en-Chartreuse (1 000 m), il y a… soixante ans ! À ce titre, la station nivo-météorologique du col de Porte constitue un des indicateurs de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique.

 

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Prévision avalanche : les activités recentrées à Saint-Martin-d’Hères ?

Créés dans les années 1970, les centres Météo-France de Chamonix, Bourg-Saint-Maurice et Briançon ont développé une expertise de pointe en matière de prévision du risque d’avalanche. En 2018, Météo-France a fait part de son intention de rapatrier le travail de ces prévisionnistes au Centre météorologique des Alpes du Nord, à Saint-Martin-d’Hères.

“Pour l’heure, une pause dans le regroupement de l’activité montagne et avalanche et le maintien temporaire des activités des trois antennes a été annoncé. Leur devenir sera décidé d’ici à l’automne 2020”, précise Serge Taboulot, directeur du centre météorologique des Alpes du Nord de Météo-France.


Le réseau des stations météo de l’Isère

Le réseau de stations climatologiques de l’Isère est l’un des plus denses de France. Il comporte 70 stations qui effectuent des relevés quotidiens de précipitations.

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Légendes :
- En rouge : stations automatisées donnant le relevé des mesures des précipitations, des températures et du vent.
- En bleu : réseau Nivôse, stations automatiques de haute montagne transmettant par satellite, en temps réel, des informations relatives à la hauteur de neige, à la vitesse du vent et aux températures
- En vert : relevés de pluie et de température.

 

 

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