- Notre histoire
Chaque jour du 20 août au 2 septembre, en coopération avec le Musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère, nous vous faisons revivre dans ces colonnes la Libération de l’Isère, telle qu’elle s’est déroulée il y a 80 ans, jour par jour. Épisode 10...
La foule et les officiels se rendent sur les lieux des charniers du Polygone pour une cérémonie funèbre émouvante. Photo. Coll. Musée de la Résistance et de la Déportation – Département de l’Isère.
C’est la toute première cérémonie commémorative d’ampleur en Isère. Le mardi 29 août 1944, la foule se rend à l’hommage rendu aux victimes des charniers du Polygone, témoins de la barbarie nazie qui se sera exercée jusque dans les dernières heures de l’Occupation.
Les cercueils de bois blanc sont alignés, couverts de fleurs. Ils contiennent 48 corps, dont une partie ne sera jamais identifiée, mitraillés par les nazis au courant des mois de juillet et août avant de quitter la ville. Ils sont les témoins de la barbarie qui se sera exercée jusqu’au bout de la guerre.
« Il y a là, sous la légère enveloppe de bois blanc, les corps si atrocement mutilés des plus braves des braves, qui tombèrent sous les balles des assassins de la Gestapo, de la Waffen ou de la Milice. Ils sont là, côte à côte, fraternellement unis dans la mort, comme ils l’avaient été dans les combats farouches pour la liberté », écrit le journal Le Travailleur alpin.
La cérémonie funèbre est courte et remplie d’émotion. L’épouse de Georges Martin, dit Géo, industriel et rugbyman voironnais très connu et dont le corps a été retrouvé au Polygone, est présente. Elle reçoit le soutien de la foule. Tout comme les autres parents des victimes.
Entre la joie de la Libération et la douleur liée aux atrocités découvertes
La découverte des fosses tragiques du Polygone reste un choc terrible. Plusieurs jours durant, des familles se sont pressées auprès de la Croix-Rouge pour tenter d’identifier un proche en examinant les reliques retrouvées dans les charniers.
Les victimes du Polygone accèdent au rang de « martyr collectif », c’est-à-dire de victimes de la barbarie allemande, une conséquence involontaire de la Résistance en Isère. Cette consécration des victimes martyres garde une place importante dans les représentations que gardent les populations du conflit et alimente une soif de vengeance envers les responsables de cette violence.
La nécessité de se souvenir et de commémorer le sacrifice des résistants, le martyre des déportés ou les souffrances de la population civile va considérablement marquer l’après-guerre, dès après la Libération.
Ce 29 août 1944, la foule et les officiels se retrouvent dignement au chemin des Buttes de Grenoble pour la cérémonie à l’intention des victimes du massacre du Polygone.
La Résistance, un marqueur extrêmement puissant en Isère
En Isère, la Résistance va rester un « marqueur » extrêmement puissant. Seules cinq communes en France sont devenues Compagnons de la Libération, et parmi elles, le Vercors et Grenoble. Plaques, stèles, monuments et musées parsèment le département et entretiennent le souvenir des résistants. Et chaque année, des cérémonies commémoratives de la Libération sont organisées dans les communes.
Pour ce qui est de la déportation raciale, il faudra attendre bien plus tard pour voir apparaître la première plaque sur les murs de l’école Bizanet en 1992 à Grenoble, lieu des rafles de 1942 orchestrées par Vichy.
Il aura fallu ce temps pour que la France, sous l’impulsion de ses historiens, arrive à affronter son passé.