Opéra : Faust prend un coup de jeunes

En 2023, 10 000 spectateurs ont applaudi Turandot, précédente production de la Fabrique Opéra au Summum de Grenoble.

Cent quatre-vingts chanteurs de 14 pays en quatre jours d’audition : La Fabrique Opéra n’a pas eu de peine à trouver les sept interprètes de sa nouvelle production du Faust de Gounod en septembre dernier ! 

Pour le rôle-titre, le jeune ténor italien Simone Fenotti, 23 ans a remporté tous les suffrages du jury : “Une révélation !” promet le directeur et chef Patrick Souillot – qui en a pourtant entendu d’autres. 

Simone aura pour principaux partenaires Chloé Chaume, l’une des sopranos les plus prometteuses de sa génération, choisie parmi 50 autres Marguerite potentielles, et le jeune baryton-basse Jean-Philippe Fillol donnera sa voix grave à Méphistophélès : “Un casting de rêve”, se réjouit le créateur de La Fabrique Opéra.

Transmettre la magie de l’opéra

En 17 productions – de La Flûte enchantée, en 2007, à Turandot, en 2023 –, l’association grenobloise, soutenue par le Département, a largement fait ses preuves sur le plan de l’excellence artistique. 

Le pari était audacieux : monter un opéra coopératif dans une salle de concert davantage conçue pour faire résonner les musiques actuelles sonorisées ! Impensable pour les puristes !

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À l’heure où le public de l’art lyrique prend des cheveux blancs et où le coût des productions devient rédhibitoire, l’ambition de transmettre la magie de l’opéra à des jeunes des quartiers populaires paraissait encore plus utopique.

L’idée-force a été d’embarquer dans l’aventure les élèves et les enseignants des établissements d’enseignement professionnel pour leur confier la création des costumes (lycée Argouges) et des décors (Institut des métiers et des techniques), les maquillages et coiffures des solistes (École Terrade), la publicité et la communication (lycée Aristide-Bergès), l’accueil (lycée Emmanuel-Mounier) et le contrôle d’accès (lycée Guynemer)…Chaque année, 450 jeunes plongent ainsi dans le grand bain d’une superproduction avec des artistes professionnels en découvrant quantité de métiers passionnants – et souvent une nouvelle motivation. 

“Au départ, certains y vont à reculons. L’opéra, ça ne leur parle pas ! Puis au fil des ateliers, on les voit prendre confiance en eux : à chaque fois, ils assurent jusqu’au bout”, observe Fleur Marin, chargée de production. 

Pour la petite équipe (trois personnes), le résultat est aussi le fruit d’un gros travail de médiation culturelle mené toute l’année dans les écoles et collèges isérois : “Pour faire tenir des jeunes assis pendant trois heures face à un opéra, il faut les intéresser, leur présenter l’intrigue…” Alexia, en service civique, a imaginé un escape game en classe autour du mythe de Faust, ce vieux savant fatigué qui vend son âme au Diable pour conquérir le cœur de Marguerite. 

Le metteur en scène Jean-Jacques Durand a quant à lui transposé la comédie dramatique de Gounod dans les années 1960 au sein d’un hôpital. Les airs époustouflants (dont le fameux Air des bijoux, popularisé par la Castafiore !) s’enchaînent à un rythme endiablé dans une folle fête des sens, jusqu’aux portes de l’enfer, avec la voix du comédien grenoblois Serge Papagalli en récitant… “À l’ère des réseaux sociaux, le thème résonne fort avec notre époque !” assure Patrick Souillot.