L’éclat retrouvé des cartes de Chartreuse

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Chartreuse ND - Bourgfontaine, Louis Licherie
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Après vingt ans de restauration, les 79 peintures monumentales représentant des monastères de l’ordre des Chartreux du XVIIe au XIXe siècles ont retrouvé leur éclat originel. Trente et une sont présentées au musée de l’Ancien Évêché.

En 2002, une vaste souscription publique était lancée au musée de l’Ancien Évêché pour restaurer les « cartes de Chartreuse ». Cet ensemble de 79 peintures monumentales datées de 1680 à 1873, représentant des vues cavalières (en plongée) des chartreuses en France et en Europe, offre un témoignage unique de la puissance et du rayonnement de l’ordre monastique à travers les siècles – à son apogée au XVIe siècle, il comptera plus de 200 monastères. 

Après les saccages des guerres de Religion, les Chartreux participent de fait activement à l’ample mouvement de reconstruction engagé à la fin du XVIe siècle. Soucieux de vérifier la conformité des projets d’agrandissement ou de reconstruction avec l’idéal cartusien de simplicité et d’austérité, le ministre général de l’ordre, dom Le Masson, exige toutefois de recevoir à la maison-mère de Saint-Pierre-de-Chartreuse des vues détaillées avant travaux. 

Si toutes les chartreuses sont implantées dans leur « désert », au milieu des bois ou des plaines, et ordonnancées selon un modèle immuable, avec leurs petits ermitages individuels, certaines d’entre elles prennent en effet, notamment aux XVIe et XVIIe siècles, des allures de résidences princières –, à l’image de celle de Pavie, en Italie. 

Certaines œuvres peuvent aussi contribuer à les magnifier. Louis Licherie, élève de Charles Le Brun, premier peintre de Louis XIV, déploie par exemple tous ses talents de paysagiste dans sa vue de la Chartreuse de Bourgfontaine à Villers-Cotterêts (aujourd’hui en ruines), avec cette scène de chasse à courre très vivante au premier plan.

Mais ces « cartes » – qui sont un peu des avant-projets d’architecte – de factures très variées sont réalisées pour la plupart par des anonymes. Les uns excellent dans le maniement du pinceau et l’art de la perspective, d’autres moins. Beaucoup ne sont pas datées. Nombre de chartreuses ayant disparu, il est aussi difficile de savoir si les travaux furent réalisés ou non ! 

La profusion des détails sur la vie monastique et les scènes du quotidien tout comme la variété des paysages représentés ne leur confèrent pas moins un intérêt artistique et historique exceptionnel. 

 

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Un chef-d’œuvre en péril 

Les pères chartreux prirent ainsi soin de les emporter avec eux en Italie lorsqu’ils furent expulsés en 1903. Retirées de leur châssis et roulées, les toiles, après leur retour en 1940, furent ensuite collées sur des planches de bois. La collection avait tout du chef-d’œuvre en péril. 

En 2002, après classement aux Monuments historiques, l’Association pour la restauration des cartes de Chartreuse fut créée à l’initiative de dom Marcellin Theeuwes, prieur de la Grande-Chartreuse, afin de réunir les fonds nécessaires. Un chantier de 1,7 million d’euros sur vingt ans, dont 40 % de fonds privés, ainsi que 750 000 euros de l’État et 380 000 euros du Département. 

Le public peut aujourd’hui les redécouvrir tout en plongeant dans l’ambiance cartusienne. Une trentaine de toiles a été sélectionnée parmi les 79 pour retracer cette histoire fascinante – les autres cartes étant conservées au musée de la Correrie, à Saint-Pierre-de-Chartreuse. 

“L’objectif est de montrer la diversité de ces chartreuses, avec des zooms sur des détails. Nous présentons par exemple deux chartreuses féminines”, révèle la conservatrice, Sylvie Vincent. 

Pour aller plus loin, un livre de l’historienne Pierrette Paravy a aussi été édité pour l’occasion chez Glénat. De quoi combler les amateurs d’histoire, d’art, d’architecture et… de chartreuse !

Encart

Pratique : 

Chartreuses. Dans le silence et la solitude. 

Jusqu’au 3 septembre au musée de l’Ancien Évêché, à Grenoble - Entrée libre.


Horaires et programmation : musees.isere.fr

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