Luthiers : pas de vague à l’âme

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Lutherie Pelloux Lee
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Transformer le bois en son. Entre le luthier et le musicien, l’alchimie opère pour que ce dernier puisse exploiter tout le potentiel de son instrument. Malgré la concurrence accrue, le métier suscite toujours autant de vocations en Isère.

Pierre Pelloux, archetier, et sa compagne, Youngnam Lee, luthière et violoniste, dans leur atelier grenoblois.
 

 

Offrir une voix à l’instrumentiste. S’accorder à la main du musicien. Redonner une seconde jeunesse à un instrument ancien. “Je fais un métier qui fait rêver, de ceux que l’on présente au journal télévisé”, s’amuse Nicolas Démarais, luthier des instruments du quatuor (violons, altos, violoncelles et contrebasses). 

Après trente ans au centre-ville de Grenoble, où il a employé jusqu’à six personnes, ce diplômé de l’école de Mirecourt, berceau français de la lutherie, a transporté son atelier à Saint-Aupre, dans le Pays voironnais, où il travaille désormais seul. “Quand je me suis installé, nous étions seulement trois ateliers sur Grenoble contre six ou sept aujourd’hui ! ”, constate-t-il.

Issu de la même école, Pascal Lavigne, qui exerce à son compte rue Mozart depuis 2000, a vu lui aussi le marché évoluer : ils sont aujourd’hui près d’une trentaine en Isère à entretenir, réparer et plus rarement, fabriquer de toutes pièces des instruments à cordes ou à vent.

“Les budgets dédiés à la réparation et à l’entretien ont tendance à diminuer”, regrette-t-il, toujours attristé de voir arriver sur l’établi des violons ou violoncelles en piteux état. Muni de sa pointe aux âmes, ce petit outil de métal cambré qui s’introduit dans la caisse de l’instrument pour le régler au plus précis, Pascal Lavigne n’en prend pas moins de plaisir à leur redonner leur belle sonorité. “S’il a été aimé et bichonné, cela s’entend.”

 

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Pour le son, chaque détail compte

Pour Mathilde Avédikian, jeune luthière et archetière diplômée de l’école de Crémone, en Italie, le contact avec le musicien reste irremplaçable. Elle a posé ses valises il y a trois ans à Saint-Michel-les-Portes, dans le Trièves : “Beaucoup sont surpris par la profondeur de leur instrument. En modifiant un paramètre, tout l’équilibre sonore peut être transformé.” 

En six ans, l’atelier grenoblois de Youngnam Lee, luthière et violoniste et Pierre Pelloux, tous deux sortis de l’école de Crémone, s’est aussi acquis une petite réputation. Pierre a fait le choix de se spécialiser dans l’archèterie – une baguette en bois de pernambouc qui a toute son importance. “Les musiciens ont tendance à se focaliser sur l’instrument, qui fait le son. Mais c’est l’archet qui produit la nuance ”, rappelle-t-il. 

Si la fabrication sur mesure reste le Graal du luthier, les commandes en revanche se font rares. “Cela demande du temps et de l’espace : c’est un autre marché”, considère Giuseppe Vennitti, à Bourgoin-Jallieu. 

Le marché étant trop étroit pour vivre d’une seule spécialité, celui qui a démarré comme accordeur de piano a multiplié les formations pour développer plusieurs cordes à son arc : “Instruments à vent, à cordes, harpes ou accordéons, pianos… Je répare toutes sortes d’instruments. Deux fois par an, le conservatoire de Bourgoin me confie tout son parc à réviser.”

 

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Manu Charlieux, créateur d’Alternative Guitare à La Chapelle-du-Bard.

 

Adrien Hartman, qui s’est mis à son compte il y a deux ans comme luthier guitare dans les locaux de Bertet Musique, à Gières, a commencé par tester tout ce qu’il avait appris au cours de ses quatre ans de formation à l’Itemm du Mans avant de se lancer dans la fabrication. 

“Au contact des clients, j’en apprends tous les jours. Il faut comprendre ce qui convient à chacun”, dit-il en dévoilant le prototype de la guitare acoustique de ses rêves. 

À l’inverse, Manu Charlieux, créateur d’Alternative Guitare à La Chapelle-du-Bard, a choisi de proposer sa propre gamme de guitares, de la plus classique à la plus excentrique. Les clients peuvent ensuite les « customiser » à l’atelier. “Choix du bois, de la forme, des micros, des finitions, chaque détail compte. Je fais 50 % du travail. Le reste appartient au musicien.”

 

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Les instruments de musique en Isère

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