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Fin septembre, les troupeaux redescendent de leurs alpages. Une culture ancestrale que le Département de l’Isère s’attache à préserver.
Ils entretiennent nos paysages de montagne, pour le grand bonheur des photographes et des touristes, favorisent la biodiversité et produisent une viande de qualité. En pâturant en alpage, les troupeaux contribuent aussi à limiter les risques d’incendies en été et d’avalanches en hiver – l’herbe pousse plus dru et retient mieux le manteau neigeux…
“Sans le pastoralisme, cette tradition millénaire consistant à emmener les troupeaux à l’alpage à la saison estivale, nos territoires de montagne seraient incultes et couverts de broussailles”, rappelait Jean-Pierre Barbier, président du Département, en juillet dernier.
Cette culture ancestrale faite de gestes, de rituels et de savoirs transmis de génération en génération, qui a permis de sélectionner des espèces adaptées à leur territoire, a plus que jamais besoin d’être défendue. Contre les attaques du loup d’abord, qui sème la panique dans les troupeaux.
“La population a plus que doublé en dix ans, avec une vingtaine de meutes cette année. Les éleveurs ont dû revoir totalement leur façon de travailler en assurant un gardiennage nuit et jour. Sur certains secteurs, on ne sort plus les bêtes”, alerte Denis Rebreyend, président de la Fédération des alpages de l’Isère (FAI 38) et éleveur en Matheysine.
Pour éviter à leur bétail de se faire dévorer, les éleveurs ont dû investir dans des chiens de protection, les patous. Ce qui n’est pas sans occasionner des problèmes avec les vététistes et randonneurs, eux aussi de plus en plus nombreux.
“Nous devons sensibiliser aux bons comportements face aux animaux, au respect des aménagements pastoraux, ne pas oublier de refermer une barrière sur un chemin par exemple, et transmettre aux citadins la culture agricole de la montagne”, affirme Joseph Paillard, technicien pastoral à la FAI. “En saison, de même que l’on regarde la météo avant de partir, on peut vérifier la présence de troupeaux sur l’application Isère Outdoor ou à l’office de tourisme.”
Les bergers, dont la présence a été renforcée, subissent également un stress accru et des horaires à rallonge – il faut parquer les animaux le soir et les libérer le matin.
L’alpage de Pravouta en Chartreuse, où le Département a installé une cabane d’appoint pour le berger.
Des productions à valoriser
En 2023, le Département a décidé de financer avec la FAI le poste d’une bergère d’appui, de juin à septembre, pour venir en renfort des bergers titulaires en cas de forte pression du loup ou d’épuisement.
Par ailleurs, cet été, une cabane d’appoint a été installée au col de Pravouta, en Chartreuse pour que le berger puisse rester la nuit auprès de son troupeau. Malmenés par le changement climatique, qui assèche les prairies et oblige à décaler l’estive, soumis à la raréfaction de l’eau potable, les éleveurs de montagne ont vu leurs charges s’alourdir. Leur nombre ne cesse de diminuer.
Heureusement, de jeunes agriculteurs engagés s’attachent à perpétuer ce mode de production basé sur l’utilisation durable des ressources naturelles, qui répond aux grands enjeux de la transition écologique.
Certains veulent relancer des filières disparues en Isère, comme la fabrication de fromages en alpage – le tout dernier se trouve au Charmant Som. Dans le Trièves, Giulia Arduca a entrepris de valoriser la laine locale bio avec 10 éleveurs du Sud-Isère (projet LanaLana).
À travers la marque « Nos produits IS HERE », l’agneau d’alpage, commercialisé jusqu’à la mi-novembre, est désormais vendu et promu dans des grandes surfaces.
Roland Bouvier (à gauche) préside l’Association des viandes agropastorales.
“C’est notre produit phare. Les agneaux passent au minimum cinquante jours en alpage, ils sont allaités au lait maternel et nourris exclusivement à l’herbe”, précise Roland Bouvier, président de l’Association des viandes agropastorales, qui regroupe aujourd’hui 20 éleveurs isérois.
Depuis trente-six ans, comme chaque fin septembre, ce dernier se prépare à redescendre son troupeau du col du Coq à Marcollin, dans la plaine : 80 kilomètres à pied en quatre jours à travers le massif de Chartreuse, avec 170 brebis. La transhumance se perpétue…
Repères :
Le pastoralisme en Isère : cliquez pour agrandir.
©F.Pattou