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Alors que 50 % des agriculteurs vont cesser leur activité dans les 10 prochaines années, la transmission des savoir-faire et la formation des nouveaux repreneurs deviennent un enjeu majeur sur l’ensemble du département. Exemple à Mens avec Pascale et Sarah.
Il n’y a pas que le Bordelais et la Bourgogne qui attirent les vignerons en France : les pieds de vigne se multiplient sur les coteaux en Isère.
En 2016, Pascale et Gilles Barbe ont changé radicalement de carrière. Ils se sont lancés dans cette aventure folle et ont monté leur domaine viticole en plein cœur du Trièves, entre 700 et 800 m d’altitude.
C’est à Mens qu’ils ont créé le domaine Les P’tits Ballons : ils ont planté 12 cépages différents sur plusieurs parcelles pour produire des vins rouge et blanc. Après sept années d’activité, les gérants, proches de la retraite, ont eu envie de passer le relais. C’est ici qu’entre en jeu Sarah Fechtenbaum.
Pascale Barbe et Sarah Fechtenbaum.
Un stage test installation transmission pour faciliter la reprise
Originaire du Sud-Ouest, la vigneronne a suivi son compagnon à Grenoble, et cherchait à monter son exploitation. Elle a découvert la possibilité de reprendre un domaine viticole par l’intermédiaire de l’association Vignes et Vignerons du Trièves.
La nouvelle installée a travaillé dans différentes fermes pour découvrir le terroir avant de commencer son “stage test installation transmission” d’un an aux P’tits Ballons, auprès de Gilles et Pascale. Un dispositif spécifique qui permet à un repreneur potentiel d’acquérir progressivement la maîtrise de l’activité à laquelle il aspire, et ainsi de faciliter la reprise d’une exploitation. « Ça n’a rien à voir avec Bordeaux : on trouve ici d’autres cépages, d’autres manières de travailler. L’agriculture de montagne, c’est vraiment différent », mesure Sarah, qui était davantage habituée au cabernet-sauvignon, un des cépages phares de Bordeaux, et qui doit désormais apprivoiser douze cépages, nouveaux pour elle. « Je pense que les gens attendent ça : d’autres goûts, des choses qui correspondent à différents terroirs », ajoute-t-elle.
L’avantage pour Sarah, c’est de pouvoir, à travers ce processus d’installation, hériter du travail qui a été réalisé durant les sept premières années d’existence du domaine. « Pascale et Gilles ont fait un énorme boulot, ils sont partis de zéro. Ce sera certainement plus facile pour moi, je vais continuer ce travail-là. »
« Gratifiant d’avoir créé quelque chose qui va continuer après soi »
Dans les vignes, en ce moment, c’est l’étape importante de l’ébourgeonnage, qui consiste à supprimer les bourgeons superflus du pied de vigne, de sorte à favoriser le bon développement des fruits. Sarah et Pascale travaillent main dans la main. « On lui laisse déjà l’opportunité de prendre en main le vignoble pour que la récolte qui va lui revenir cette année, corresponde au travail qu’elle a fait. Elle a carte blanche et on l’accompagne. C’est elle à la barre ! » souligne Pascale Barbe.
Les deux femmes se sont bien trouvées : elles partagent les mêmes envies et la même vision des choses. « C’est une super opportunité et c’est gratifiant d’avoir créé quelque chose qui va continuer après soi », évoque encore Pascale. Le stage test de Sarah au domaine Les P’tits Ballons durera plus d’un an, le temps que Sarah reprenne l’exploitation en tant que dirigeante le 1er novembre prochain. D’ici là, elle aura eu le temps d’appréhender toutes les étapes de fabrication des vins, toutes les saisons, au cœur du domaine, et découvrir les démarches administratives, créer son réseau de partenaires…
Sarah entend bien sûr conserver l’héritage de ses deux prédécesseurs et souhaite développer l’activité. La vigneronne expérimente actuellement des vins de rhubarbe et des vins de fruits rouges. Une bonne manière de se démarquer et de continuer de proposer de nouvelles saveurs.
Repères :
Le Département soutient le développement de la viticulture iséroise
Le Département de l’Isère a signé une charte avec le Syndicat des vins de l’Isère pour accompagner le développement de la filière : 110 000 euros sont prévus en 2023 dans le cadre de la politique agricole du Département pour aider à la plantation de cépages autochtones, investir dans du matériel de culture, ou encore dans la prévention des aléas climatiques. Sarah Fechtenbaum pourra se tourner par exemple vers le syndicat qui l’accompagnera dans le dépôt des dossiers d’aides.
Aujourd’hui, plus de 60 % des installations en Isère sont réalisées hors cadre successoral. 60 à 100 nouveaux candidats s'inscrivent chaque année au “Répertoire Départ Installation” géré par la Chambre d’agriculture, et sont accompagnés sur plusieurs années dans leur recherche.
En 2022, avec le soutien financier du Département, la Chambre d’agriculture a accompagné :
• environ 400 porteurs de projet ou d’idée dans leur parcours vers l’installation, en termes d’acquisition de compétences, de construction d’un projet professionnel intégré dans son territoire, et de mise en relation avec de futurs cédants ;
• 120 nouveaux installés pour sécuriser le démarrage de leur activité agricole puis la pérenniser dans le temps.
• 180 agriculteurs ou propriétaires cédants dans leur démarche de transmission.