La Révolution… dans les assiettes

Une gerbe de blé où sont plantées l’épée de la noblesse et la crosse du clergé (symbole des trois ordres de l’ancien régime réunis) ; l’oiseau de la liberté ; la cocarde tricolore… Durant la période révolutionnaire, ces emblèmes patriotiques peints à la main fleurissent sur les assiettes, pichets, saladiers et autres plats issus des faïenceries de la vallée de la Loire (notamment à Nevers ou Roanne), de Lorraine ou du nord de la France.

La production à bas coût s’est beaucoup développée au cours du XVIII^e siècle et se retrouve désormais dans les vaisseliers et les intérieurs de tout un chacun. Les assiettes patronymiques associées au nom de famille, offertes pour les naissances ou baptêmes, font aussi de superbes cartes de visite pour les tonneliers, bateliers et autres artisans.

Riche de quelque 150 pièces, la collection rassemblée à Vizille témoigne de cette vogue qui se propage par-delà les frontières nationales avec les idées des Lumières. Utilisant la technique de la gravure sur céramique, les manufactures britanniques décorent des mugs avec la démolition de la Bastille et celles de Hollande remplacent le bonnet phrygien par le chapeau rond des Bataves sur les piques.

Au premier étage du château-musée – le seul en France à présenter la Révolution à travers les beaux arts –, on s’attardera également sur le luxueux service à thé en porcelaine de Sèvres, daté de 1794, avec sa tasse et soucoupe à l’effigie de Bara, « martyre de la liberté » et son plateau figurant la fête de l’Être suprême, donnée sur le Champ-de-Mars en hommage à Robespierre.

En pleine Terreur, la production atteint des combles de raffinement et se met au service de la propagande révolutionnaire. Les assiettes n’ont pas fini de nous raconter des histoires !